Allocution du Président de la République d`Azerbaïdjan, M. Heydar Aliev, à une conférence de presse donnée lors d`une visite officielle en Chine - Le 8 mars 1994


Mesdames et Messieurs,

Cela fait deux jours que nous nous trouvons à Pékin. Je me suis rendu en Chine en visite officielle sur l`invitation du Président de la République Populaire. Une grande délégation de représentants de l`Azerbaïdjan m`accompagne. Nous avons déjà eu un certain nombre de rencontres positives avec les dirigeants de la Chine. 

Hier eurent lieu la cérémonie officielle de rencontre ainsi que des pourparlers avec le représentant de la RPC M. Jian Zemin, qui se sont achevés par la signature d`un éventail de documents. Nous avons eu un échange de vues approfondi à propos de nos relations bilatérales et nous avons partagé cette opinion qu`entre nos deux pays la relation bilatérale devait se développer de chaque côté et devenir plus consistante. Les possibilités de croissance de notre partenariat dans les secteurs du commerce, de l`économie, des sciences, des techniques, du tourisme, ont trouvé un écho dans le résultat obtenu par la signature de ces documents. Nous avons également échangé sur les questions de la situation internationale. Pour nous la position de la République Populaire Chine dans la politique internationale est une thématique de premier ordre, notamment concernant les pays ayant acquis récemment leur indépendance et qui se lancent sur le chemin de leur développement propre.

A cet égard et à l`égard de la question de l`intégrité territoriale des Etats, de l`intangibilité des frontières, de la souveraineté, de l`indépendance, nous nous sommes découverts en pleine convergence de vues et de position. J`ai eu le loisir d`informer dans les détails le Président de RPC sur la vie et la situation actuelle de l`Azerbaïdjan. Je lui ai fourni des informations nombreuses sur la guerre qui fait rage depuis environ six ans entre l`Azerbaïdjan et l`Arménie, sur le conflit dénommé «conflit du Haut-Karabagh» et sur notre aspiration à mettre un terme aux hostilités, à en terminer avec la situation de guerre, et à résoudre la question par la voie des négociations, par la voie de la paix et de la concorde.

Aujourd`hui, nous avons rencontré le Premier ministre du Conseil de l`Etat M. Li Peng. Toutes les questions qui avaient fait l`objet de notre échange de vues avec le Président furent le thème de notre conversation avec M. Li Peng. Nous nous sommes convaincu à nouveau que la position de la direction de la République Populaire de Chine dans ses aspects de politique étrangère et intérieure était unitaire et ferme. Dans nos conversations nous avons manifesté de l`intérêt - car aujourd`hui, nous avons cet intérêt - pour les réformes économiques qui se sont mises en place en Chine depuis plusieurs années. Il fut prêté une grande attention à ces questions dans nos entretiens tant avec le Président qu`avec le Premier ministre. Encore aujourd`hui nous avons rencontré le ministre des Réformes, en compagnie de qui nous avons évoqué en profondeur les questions de la mise en œuvre des réformes économiques. 

Notre visite, comme vous le savez, se poursuit. Demain nous attend une nouvelle visite à Pékin, puis nous partirons pour Shanghaï. A ce propos, la proposition de visiter la ville de Shanghaï fut avancée hier par le Président de RPC pendant notre rencontre. 

A ce stade de notre évaluation, nous pouvons dire que nous sommes satisfaits. Comme je l`ai déjà fait observer, nous avons eu des contacts très intéressants et productifs avec le Président de la République Populaire de Chine, nous avons signé encore sept documents intergouvernementaux qui vont fonder les futures relations entre la Chine et l`Azerbaïdjan. Il n`est pas indifférent de mentionner que nous avons pu informer la direction chinoise de la situation de notre pays et de la guerre qui nous a été imposée par l`agression arménienne et de bien d`autres aspects concernant notre région. 

Le point important est que cette première visite du Président de la République indépendante d`Azerbaïdjan en République Populaire de Chine ait eu lieu, que nous ayons pu renouer des relations amicales au plus haut niveau de la direction des deux pays, et que nous ayons pu informer la direction chinoise de la situation dans la région, sachant que le grand éloignement de la Chine ne lui permettait pas de disposer de tous les détails de notre contexte caucasien. 

L`Azerbaïdjan est un jeune Etat indépendant qui traverse une épreuve pénible de son histoire. Il est extrêmement important que les contacts soient établis au plus haut niveau entre l`Azerbaïdjan et un état aussi puissant que celui de la Chine et que soient ouvertes les perspectives de futurs développements positifs entre nous. Nous attachons à cela une grande signification du fait que la Chine occupe une place importante dans l`économie, qu`elle pèse de son poids dans les relations internationales et la politique mondiale, et qu`elle est de surcroît membre permanent du Conseil de Sécurité des Nations-Unies. 

J`aimerais évoquer brièvement la situation en Azerbaïdjan, sur les mesures qui sont prises actuellement dans notre pays, sur les choix qui attendent notre République, parmi lesquels figure l`agression arménienne contre l`Azerbaïdjan, puisque c`est ainsi que l`on nomme le problème du Haut-Karabagh. 

L`Azerbaïdjan a recouvré son indépendance au lendemain de la chute de l`Union Soviétique. L`aspiration à devenir un Etat indépendant est resté vivant dans notre peuple, lequel s`est retrouvé pendant presque 200 ans sous la coupe de l`empire tsariste puis de l`Union Soviétique. Comme n`importe quel autre peuple, le peuple azerbaïdjanais aspirait à la liberté et à l`indépendance, et la restauration de cette indépendance est devenue pour lui l`événement le plus important de son Histoire. Par ailleurs, face à l`indépendance de l`Etat azerbaïdjanais se sont élevés des problèmes extrêmement difficiles, relevant de l`état économique et social, de l`affirmation d`une pleine souveraineté, de l`indépendance, de la construction de l`Etat, de notre apparition sur la scène internationale. Il a fallu résoudre tous ces problèmes au cours des deux années écoulées dans le contexte pénible de l`agression militaire arménienne. 

L`économie de l`Azerbaïdjan traverse une crise profonde. Cette crise, naturellement, a des répercussions très dommageables sur le niveau de vie et le bien-être de la population. Cette crise s`est révélée être la suite d`un processus qui se faisait déjà jour dans l`ex-Union Soviétique pendant les dernières années de son existence et elle est une caractéristique de presque toutes les anciennes républiques de la Fédération soviétique qui sont devenues indépendantes, et pas seulement de l`Azerbaïdjan. La crise a redoublé en Azerbaïdjan car, comme je l`ai déjà dit, notre pays se trouve en situation de belligérance du fait de l`agression de la République d`Arménie. Le conflit armé, apparu il y a bientôt six ans, est lié à ce qu`on a coutume d`appeler le problème du Haut-Karabagh, qui s`est développé à grande échelle et qui a conduit à ce que les forces armées arméniennes occupent aujourd`hui presque 20 pour cent du territoire national azerbaïdjanais. Plus d`un million d`habitants vivant dans les territoires désormais occupés sont devenus des réfugiés, privés de leurs maisons, de leurs biens, et maintenant dispersés dans les différentes régions du pays où ils affrontent une situation pénible. 

Malheureusement, à l`intérieur du pays, le contexte politique de l`Azerbaïdjan fut marqué ces dernières années par l`instabilité. La guerre contre l`Arménie et la lutte de différents groupements politiques pour le pouvoir ont provoqué des changements de régime. Ce type de complication est survenu pour la dernière fois l`été dernier, à un moment où l`Azerbaïdjan se trouvait au bord de la guerre civile. Mais ce genre d`engrenages, du moins le croyons-nous, sont surmontés. Maintenant, le contexte intérieur politique et social est stabilisé, toutefois tout cela ne pouvait pas ne pas avoir une influence négative sur la situation économique et sociale et ne pas créer des difficultés supplémentaires. En ce qui concerne la situation intérieure, un processus de construction d`un Etat de droit démocratique est en cours. En Azerbaïdjan se sont formées des conditions favorables pour le développement de la démocratie, du pluralisme politique, du multipartisme, de la défense des Droits de l`Homme, des libertés de la personne, de la liberté de conscience et de la liberté religieuse, de la liberté d`entreprise et de l`initiative. L`Etat indépendant d`Azerbaïdjan construit une société démocratique sur les principes de liberté et de démocratie dans le plein sens du mot. 

A l`heure actuelle, une quarantaine de partis politiques sont dûment enregistrés et fonctionnent librement, et il existe plus de 600 journaux. Pour un pays qui n`est pas si grand et qui compte environ 7 millions d`habitants, ce sont des chiffres relativement élevés. Les partis et la presse disposent sans conteste de la liberté d`expression. Un certain nombre de partis et d`organes de presse se situent dans l`opposition et exposent leurs vues. Tout cela permet de qualifier notre République de respectueuse des libertés démocratiques. 

L`Azerbaïdjan est un Etat multi-ethnique. Tous ses citoyens, quelle que soit leur appartenance culturelle, leur confession, et leurs convictions politiques jouissent de droits égaux. Nous créons de même les conditions favorables pour que chaque citoyen d`Azerbaïdjan puisse se sentir libre et égal en droits à tous les autres. 

Du point de vue de la politique extérieure, l`Azerbaïdjan adhère aux principes d`égalité de droits des Etats. Nous avons déjà établi des relations diplomatiques avec tout un volant de nations, notre République est membre de l`ONU, elle appartient à plusieurs organisations internationales, elle a l`intention de participer activement à la vie internationale et souhaite tenir une digne place dans l`arène mondiale. La preuve en est que l`Azerbaïdjan aspire à établir une relation avec tous les pays du monde et c`est justement la motivation de notre venue ici, en Chine. Les documents qui ont été signés entre nos deux nations retiennent ce principe qui est à la base du futur développement de la relation entre le République Populaire de Chine et l`Azerbaïdjan. 

Le problème principal de l`Azerbaïdjan est la guerre, qui prend son origine dans l`agression armée de l`Arménie contre notre République. La guerre a été déclenchée par l`Arménie dans le but de retrancher une partie du territoire de l`Azerbaïdjan, le Haut-Karabagh, avant de l`annexer à l`Arménie. La guerre a aggravé la situation dans toute la région et a plongé dans le malheur le peuple arménien et le peuple azerbaïdjanais. Les hostilités, malheureusement, se poursuivent et des gens, à l`heure où je vous parle, perdent la vie et le sang coule. Cela est, je le répète, ce qu`il y a de plus pénible pour l`Azerbaïdjan. L`Azerbaïdjan ne désire pas la guerre, il cherche à arrêter les hostilités et à résoudre la question par la seule voie de la paix. A cette fin, le moyen le plus important, le plus fiable et le plus infaillible est le retrait des forces armées arméniennes des territoires qu`elles occupent en Azerbaïdjan, et donc la garantie de son intégrité territoriale et de l`intangibilité de ses frontières.

Malheureusement dans certains cercles et dans certains pays ce conflit est associé avec l`idée d`une soi-disant «aspiration à l`autonomie» de la population arménienne qui vit dans le Haut-Karabagh. Cela ne correspond pas à la réalité et une telle vue, visiblement, relève du bel impact de la propagande arménienne et de la désinformation de la communauté internationale. La population arménienne du Haut-Karabagh disposait de l`autonomie, cette région existait de façon autonome dans le cadre de l`Azerbaïdjan depuis presque soixante-dix ans. En considération du fait que 70 % de la population se déclarait d`origine arménienne et que 30% se déclaraient Azerbaïdjanais, il fut conféré à la région un statut d`autonomie. Le conflit est né non pas de l`absence d`autonomie mais parce que des cercles d`activistes bien connus en République d`Arménie et dans le Haut-Karabagh avaient résolu d`annexer le Haut-Karabagh à l`Arménie. Il est clair que l`Azerbaïdjan ne pouvait adhérer à ce plan d`annexion d`une partie de son territoire par un autre Etat. Et cela a été le point de départ du conflit. 

Nous partons du point de vue que l`intégrité territoriale de la République d`Azerbaïdjan doit être complètement restaurée. Nous n`avons aucune prétention territoriale, quoique nous serions historiquement fondés à en avoir, mais nous ne cèderons jamais une quelconque portion de notre terre. En cherchant obtenir une cessation des hostilités et une régularisation de nos relations avec l`Arménie par le chemin de la paix, par la négociation, nous, sans la moindre réserve, nous avons attesté et nous attestons que la sécurité et les droits de la population arménienne sont garantis par la Constitution de l`Azerbaïdjan et par les organes d`Etat de la République. Si nous recevons une offre de retrait inconditionnel des forces armées arméniennes hors des territoires qui sont sous occupation, alors la partie azerbaïdjanaise considèrera la question du statut du Haut-Karabagh. Nous recherchons une solution à tout ce nœud de questions avec le concours des institutions internationales, de l`organisation des Nations-Unies et de son Conseil de Sécurité, de la CSCE et de son Groupe de Minsk, qui a été créé par la CSCE dans cette intention. Tout le monde sait que les Nations-Unies ont été saisies plusieurs fois de cette question et qu`elles ont adopté déjà quatre résolutions exigeant le retrait inconditionnel des forces armées arméniennes des territoires qu`elles maintiennent sous occupation militaire. 

Cependant ces résolutions sont restées totalement ignorées par la partie arménienne. Les efforts de la CSCE et plus particulièrement de son groupe de Minsk, orientés à cet effet n`ont été jusqu`à présent couronnés d`aucun succès. En dépit du fait que la CSCE et le Groupe de Minsk aient à plusieurs reprises proposé des solutions, et même établirent des modélisations de retrait des armées arméniennes de nos territoires, ces actions sont restées vaines. De la sorte, les menées agressives de l`Arménie à l`encontre de l`Azerbaïdjan et leur dédain face aux injonctions des institutions internationales démontrent clairement qu`ils persistent à atteindre leur but par la force, c`est -à-dire à violer l`intégrité territoriale de l`Azerbaïdjan et à en modifier les frontières, ce à quoi nous ne consentirons jamais. Il faut remarquer que la position de l`Arménie est largement liée au fait qu`elle bénéficie du soutien d`un certain nombre de cercles à l`étranger et de quelques pays, ce qui explique pourquoi elle se permet d`ignorer les décisions du Conseil de Sécurité de l`ONU, de la CSCE et d`autres institutions internationales.

Regardez, voici une carte qui montre très clairement l`ampleur de l`invasion de l`Arménie. Ici, l`Azerbaïdjan, ici la République autonome du Nakhitchevan, qui dépend de l`Azerbaïdjan, ici l`Arménie. Voilà, ce qui est marqué en rouge dessine les contours de la région autonome du Haut-Karabagh, qui se trouve aujourd`hui en totalité sous le contrôle des formations armées arméniennes. Comme je l`ai déjà dit, 30% de la population était composée d`Azerbaïdjanais qui ont été expulsés. Il s`agit d`environ 50.000 personnes. A ce jour, il n`y a plus un Azerbaïdjanais sur le territoire de la région autonome, tandis que la population arménienne continue d`y vivre. 

Elargissant le rayon de leur invasion, les forces armées arméniennes ont ensuite occupé les sept départements azerbaïdjanais suivants: Latchin, Kelbadjar, Agdam, Fizouli, Djébraïl, Zanguelan et Goubatli. Cela représente, comme je le disais, environ 20% du territoire de notre République. Plus d`un million d`Azerbaïdjanais de ces régions sont aujourd`hui des réfugiés qui se sont dispersés dans les autres régions du pays, dont une notable partie à Bakou. Les quatre résolutions du Conseil de Sécurité de l`ONU, que j`ai évoquées plus tôt, concernaient justement les départements de Kelbadjar, d`Agdam, de Fizouli, de Zanguelan et de Goubatli. 

En occupant ces départements, d`une part les forces armées arméniennes se sont ouvert un chemin qui permet d`annexer facilement ces territoires à l`Arménie et d`autre part elles ont pris le contrôle de la frontière nationale de l`Azerbaïdjan avec l`Iran sur une longueur d`environ 140 km. Regardez, c`est l`Iran. Je crois qu`il n`est pas nécessaire de prouver qu`il s`agit d`une guerre d`agression lorsqu`on s`empare par la force des territoires d`un autre pays. Et, bien évidemment, il n`est pas plus nécessaire de prouver à la communauté internationale qu`il faut mettre fin à cette guerre d`agression. 

Je le répète: nous cherchons à obtenir une solution à ce problème par des moyens pacifiques, nous poursuivrons nos initiatives et nos démarches dans cet esprit. Toutefois, nous ne pouvons pas nous réconcilier dans ce contexte ainsi créé. Des unités de l`armée azerbaïdjanaise conduisent actuellement des opérations assez prometteuses pour libérer nos terres par les armes au cas où les moyens pacifiques ne donneraient pas de résultats. Il y a peu, avec la médiation du ministère de la Défense de Russie, il fut obtenu une entente sur un cessez-le-feu à partir du 1er mars ainsi que la tenue de pourparlers de paix concernant le retrait des forces arméniennes hors des zones qu`ils occupent. Nous avons fermement respecté les principes de cet accord mais du 3 au 5 mars des unités arméniennes ont lancé une attaque massive contre les positions azerbaïdjanaises à laquelle les nôtres ont opposé une résistance opiniâtre. De tout cela, il n`a résulté que de nouvelles pertes humaines et du sang versé tant du côté azerbaïdjanais que du côté arménien. 

L`intégrité territoriale, l`intangibilité des frontières de chaque Etat sont des principes immuables du droit international, fixés dans les documents de l`Organisation des Nations-Unies. Pendant nos négociations avec les dirigeants chinois - Le Président et le Premier ministre - la partie chinoise a clairement affirmé sa position selon laquelle elle s`opposait à toute modification de frontières par la force et à une quelconque atteinte à l`intégrité territoriale d`un pays. S`appuyant sur ces principes reconnus dans les documents de l`ONU, mais aussi par le droit international et confirmés par tous les pays, nous allons rechercher la voie vers notre intégrité territoriale et vers l`intangibilité de nos frontières. A ce stade, bien entendu, nous avons besoin du soutien de la communauté internationale, des organisations internationales, des Etats, en particulier de la République Populaire de Chine. Je dois dire que la délégation de la RPC à l`ONU, et plus précisément au Conseil de Sécurité dont elle est un membre permanent, s`est tenu invariablement à une position de justice lors de l`examen de ces questions concernant l`agression arménienne contre l`Azerbaïdjan. 

Et je profite de mon séjour ici pour exprimer notre gratitude à la direction de la Chine pour cette attitude de justice. J`ai déjà suffisamment parlé aux journalistes qui sont rassemblés ici de la situation intérieure de l`Azerbaïdjan, des problèmes que résout notre République, de la politique étrangère de l`Azerbaïdjan, des résultats de nos rencontres ici, à Pékin. C`est pourquoi je n`ose retenir plus longtemps votre attention. S`il y a quelques questions, je suis prêt à y répondre. 

QUESTION: Quel rôle pour la Russie pour le règlement de ce conflit ? Quelles sont les perspectives de développement de la relation entre la Russie et l`Azerbaïdjan ? 

REPONSE: Je commencerai par la deuxième partie de votre question. Les relations azerbaïdjano-russes sont maintenant normales, elles sont bonnes. Jusqu`à une époque récente, il y eut des difficultés dues pour l`essentiel à la position de la précédente direction en Azerbaïdjan. Depuis la deuxième moitié de l`année passée, ces relations ont commencé à se normaliser. Je me suis rendu à Moscou, j`ai rencontré le Président Boris Eltsine et le Premier ministre Viktor Tchernomyrdine et d`autres personnalités du pays. Nous nous sommes mis d`accord sur de mesures de nivellement des obstacles qui s`étaient élevés jusque-là dans les relations entre nos deux pays. Et à l`heure actuelle, je le répète ces relations relèvent du registre de la normalité et de l`amitié. 

En ce qui concerne son rôle dans la résolution du conflit, la Russie est constamment partie prenante. Comme vous le savez, ce conflit a éclaté au début de l`année 1988, alors dans le cadre de l`Union soviétique où il a été fait des tentatives de le résoudre, mais sans y parvenir. Mais, avant toutes choses, il me semble qu`ils n`en avaient pas la volonté, dans le cadre soviétique il aurait été possible de le faire, il y avait des possibilités réelles pour cela. Ainsi, si nous considérons que la Russie est le successeur en droit de l`ancienne Union Soviétique, elle est depuis cette époque incluse dans ce processus. 

La Russie est membre de la CSCE et du Groupe de Minsk, or le Groupe de Minsk, comme je le disais, a été fondé pour répondre à cette situation. A part cela, la Russie s`exprime aussi de sa propre initiative. Notamment, le 18 février à Moscou fut signé un protocole dont la Russie, l`Arménie et l`Azerbaïdjan furent les signataires et qui envisageait le retrait des forces armées arméniennes de nos territoires occupés. Il fut obtenu un accord de cessez-le -feu à compter du 1er mars qui prévoyait qu`un retrait des troupes commencerait trois jours après. Cependant rien de cela ne se produisit. Que puis-je dire ? La Russie est partie à ce processus, mais sans résultats pour l`instant. 

QUESTION: M. le Président, j`ai deux questions. Récemment, la Chine a plus d`une fois déclaré qu`elle était prête à s`engager de la façon la plus active dans la recherche d`une solution au conflit autour du Haut-Karabagh. Il est possible, et même probable que vous ayez eu des entretiens à ce propos. Je voulais vous demander si cette offre prendrait la forme d`une posture active au sein du Conseil de Sécurité et dans d`autres institutions ou si elle prendrait une autre forme, une initiative de paix, une médiation directe dans la zone de conflit ? C`est ma première question. Ma seconde question: a-t-on évoqué pendant vos entretiens une aide économique, des crédits pour l`Azerbaïdjan de la part de la Chine ? Merci. 

REPONSE: A propos de la première question, j`ai déjà dit que la Chine adopte une position de principes et de justice au sein du Conseil de Sécurité de l`ONU. Des structures «ad hoc» pour traiter ce conflit sont mises sur pied par la CSCE, et la Chine ne relève pas de la scène européenne. La question d`une quelconque médiation concrète ne s`est pas posée ici. Mais en ce qui concerne des aides de la Chine à l`Azerbaïdjan, alors, sans conteste, la coopération que nous ravivons comportera un caractère mutuellement profitable. A côté de cela, la Chine a la possibilité d`apporter son aide à l`Azerbaïdjan, fût-elle sous la forme de crédits. 

QUESTION: Les entretiens ont-ils porté sur la fourniture d`une aide militaire de la Chine ? Deuxième question: on nous a remis une brochure qui s`intitule «Le nazisme arménien». Vous avez évoqué ici votre désir d`apporter des informations complètes et équilibrées devant la communauté internationale sur les événements de la région. Pensez-vous que des publications de ce genre sont des informations ou plutôt de la propagande ? 

REPONSE: Premièrement, il n`y a eu aucun entretien au sujet d`une aide militaire chinoise. Et il n`y en pas de nécessité. L`Azerbaïdjan, aussi pénible la situation soit-elle, se suffit à lui-même et, je le crois, viendra à bout de cette épreuve. 

Concernant votre seconde remarque à propos de la brochure: si vous étiez un tant soit peu familier de la propagande que diffuse la partie arménienne presque dans tous les pays et au sein des organisations internationales, vous ne réagiriez pas de cette façon devant cette publication. La partie arménienne répand dans les organisations internationales dans tous les pays cent fois plus de ces brochures et plaquettes. La situation est inégale entre l`Azerbaïdjan et l`Arménie dans ce conflit de ce point de vue, du fait que la partie arménienne dispose d`extraordinaires facultés d`influencer l`opinion publique dans d`autres pays. L`Azerbaïdjan ne dispose presque pas de telles possibilités. Vous savez bien quelle est la diaspora d`Arménie en Europe, aux Etats-Unis, en Russie, en particulier à Moscou. Et vous savez quels sont ses efforts en matière de désinformation de l`opinion publique, ne serait-ce déjà qu`à travers la presse russe. Voilà pourquoi je fais le vœu que cette brochure ne vous trouble pas car elle a un caractère informatif et objectif, et n`est en rien propagandiste.  

Merci de votre attention. Au revoir. 

Journal «Bakinskii rabotchii», 25 mars 1994