Discours du Président de la République d`Azerbaïdjan Heydar Aliyev à la rencontre avec les politologues, hommes politiques éminents et représentants de presse des USA - Le 30 juillet 1997


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Chers amis !

Je suis très heureux d`avoir la possibilité de vous rencontrer. Chacun parmi vous est connu comme un homme politique, homme d`Etat. Dans le passé, à l`époque de l`Union soviétique, les noms de la plupart de vous apparaissaient régulièrement dans les journaux, se faisaient entendre à la télé. Après l`effondrement de l`URSS l`intérêt envers vous, votre travail, vos biographies n`a pas faibli. Puisque vous avez participé à l`effondrement de l`Union soviétique. Cependant, il y a ceux qui voudraient la restaurer. C`est pourquoi ils ne vous oublient pas. Je considère que vous non plus vous ne les avez pas oubliés.

Je suis très satisfait de la rencontre avec vous et je vous salue sincèrement. Vous savez que je suis arrivé à Washington hier, dans l`après-midi. La rencontre avec vous est une de mes premières rencontres à Washington. Il y a une certaine régularité. Pour connaître bien les Etats-Unis d`Amérique, leur société et les organes d`Etat, il faut impérativement vous rencontrer.

Je connais bien tous vos noms. Je sais que par le passé et à présent vous êtes des personnages jouant un rôle important dans la formation de l`avis sur la vie sociopolitique des Etats-Unis d`Amérique, dans la définition et mise en place de la politique nationale. Avec certains de vous j`ai eu les rencontres personnelles. Mais ceux que je n`avais pas rencontrés, je les connais par l`intermédiaire des livres et des journaux. Vos portraits sont souvent présents dans les livres, journaux, sont montrés à la télévision. C`est pourquoi je connais de vue la plupart de vous.

Vous savez que c`est ma première visite officielle aux Etats-Unis d`Amérique en qualité de Président de la République d`Azerbaïdjan. Je prête une grande attention à cette visite, à toutes les rencontres que j`ai eues et j`y place de grands espoirs.

L`Azerbaïdjan en tant qu`Etat indépendant a besoin de coopérer étroitement avec les Etats-Unis d`Amérique pour défendre et préserver son indépendance, pour construire un Etat de droit, démocratique, laïc. C`est pourquoi il est très important de converser, d`avoir des consultations avec vous.

La coopération américano- azerbaïdjanaise continue à se développer avec succès. J`apprécie positivement les résultats acquis pour aujourd`hui dans le développement de nos relations. Je considère que nous ayons pu jeter les bases des relations amicales entre nos pays. Cependant, dans ce domaine il y a certains problèmes.

Nos liens économiques se développent avec succès. Cependant il y a un besoin de l`aide de l`Amérique dans le domaine de la défense et préservation de l`indépendance de l`Azerbaïdjan, l`assurance des intérêts économiques des Etats-Unis d`Amérique en Azerbaïdjan, résolution d`un nombre des problèmes de notre république.

Le problème le plus important pour nous est le problème de la résolution pacifique du conflit arménien- azerbaïdjanais et l`annulation de l`article injuste 907 adopté par le congrès des Etats-Unis d`Amérique et orienté contre l`Azerbaïdjan.

Je pense que vous connaissez bien l`importance de l`Azerbaïdjan dans la région du Caucase. C`est pourquoi votre aide nous est très importante dans la résolution de ces questions.

Au cours de notre entretien nous pouvons évoquer autres questions également. Je suis prêt à entretenir avec vous de chaque question et je le voudrais.

Zbignew Brzezinski: Monsieur le Président, merci beaucoup. Nous nous sommes réunis ici afin de vous informer des avis des personnes jouant un rôle clé dans la définition de la politique extérieure de l`Amérique.

Notre but consiste à vous faire apprendre les avis des personnes réunies ici sur la politique des Etats-Unis d`Amérique concernant votre région.

Afin de rendre notre travail plus efficace, j`appelle tout participant de la rencontre à faire part de ses idées sur la politique des Etats-Unis d`Amérique concernant votre région. Si les participants de la rencontre ont des questions alors posez -les.

Question: Si je ne me trompe pas, j`ai rencontré le Président Heydar Aliyev il y a deux ans à Achkhabad. Je pense qu`à l`époque, de telles tendances se faisaient sentir dans la politique américaine. Je suis très content qu`à partir de cette période une série de changements eurent lieu dans la politique des Etats-Unis d`Amérique. La position des Etats-Unis d`Amérique qui prévoyait à créer à la Russie une possibilité à avoir l`impact sur la Caspienne a un peu faibli. Je considère qu`en Amérique on commença à concevoir que la Caspienne est un bassin commun pour tous les Etats attenants. Je pense que l`administration des USA et le peuple américain soient des partisans fervents de la défense et de la préservation de l`indépendance actuelle des Etats, qui furent au sein de l`Union soviétique dans le passé. De ce point de vue nous sommes des partisans sérieux de ce que la Russie ne s`ingère pas dans les affaires intérieures des Etats de la région.

En conclusion, je veux exprimer l`espoir que vous feriez un certain progrès aux négociations concernant le territoire contesté. Malheureusement, nous ne voyons pas de progrès sérieux ce dernier mois dans ce domaine.

Monsieur le Président, nous voudrions savoir votre position dans cette question.

Heydar Aliyev: Je vais répondre puisque c`est une bonne question. Premièrement, nous sommes du même avis sur ce qu`il ne faut pas laisser la Caspienne en pouvoir exclusif de la Russie, ce qui est la direction principale de notre politique.

Vous savez que durant des siècles la Russie régnait en maître absolu sur la mer Caspienne. A l`époque de l`Union soviétique la Caspienne appartenait intégralement à l`Union soviétique. L`Iran avait sous contrôle une petite partie au Sud de la Caspienne. Entre l`Union soviétique et l`Iran fut délimitée la frontière en Caspienne, de Hassangulu jusqu`à Astara. Hassangulu se situe au Turkménistan, Astara - en Azerbaïdjan. La frontière suit cette ligne. A ce temps, l`Union soviétique extrayait le pétrole en Caspienne. L`extraction était faite exclusivement par l`Azerbaïdjan.

Vous savez que l`Azerbaïdjan commença l`extraction du pétrole dans la partie profonde de la Caspienne il y a 50 ans - en 1947. Cela fut le mérite particulier des Azerbaïdjanais, de nos savants, pétroliers. Cependant, en 1970 quand l`Azerbaïdjan extrayait déjà le pétrole dans d`autres parties de la Caspienne, on procéda au partage de la Caspienne en secteurs. Alors en 1970, le gouvernement soviétique adopta un arrêté spécial à ce sujet.

Je voudrais que vous sachiez, bien que l`extraction du pétrole soit faite par les entreprises de l`industrie pétrolière azerbaïdjanaise, suite au partage sectoriel, le pétrole extrait dans les secteurs était enregistré sur le compte de la république dans le secteur de laquelle il fut extrait.

Après le recouvrement de l`indépendance nationale on procéda à l`exploitation des gisements pétroliers découverts par l`Azerbaïdjan et au processus d`attirance des compagnies pétrolières étrangères pour l`activité commune. En septembre 1994, nous avons signé le premier grand contrat pétrolier. Je pense qu`on le nomma " Contrat du siècle " pour la première fois en Amérique. Pour mettre en place ce contrat fut créé le consortium ou le rôle de locomotive revient aux compagnies américaines. Au sein de ce consortium sont regroupés les compagnies américaines "AMOKO", "Pennzoil , " Unocal ", Mac Dermot ", " Exon " et la compagnie britannique " British Petroleum ", la compagnie norvégienne - " Statoil ". Après la signature du contrat se posa la question de la définition du statut de la Caspienne. Nous avons adopté cette proposition, cependant les avis sur la détermination du statut se sont partagés.

Pour régner sur la Caspienne, la Russie étant l`Etat le plus grand et puissant sur la Caspienne avança le principe de condominium, c'est-à-dire l`appartenance aux pays caspiens d`une partie de la mer le long de 12 mille de la côte et le reste doit appartenir à tout le monde.

Dès 1970 dans l`extraction des ressources minières dans certains secteurs de la Caspienne nous partons du principe sectoriel du partage de la Caspienne. C`est pourquoi deux pays de cinq pays caspiens sont partisans du partage sectoriel de la Caspienne et trois - du condominium. Je pense qu`il n`y a pas besoin de prouver que si la proposition de la Russie est acceptée, alors la Caspienne sera entièrement entre ses mains. C`est pourquoi je considère que vous aussi devez nous aider.

Pour définir le statut de la Caspienne on a recours au principe prioritaire suivant: la Caspienne est un bassin aquatique non ordinaire, cependant dans le monde il y a des lacs qui lui ressemblent, il y a un précédent de leur partage en secteurs ou bien de leur appartenance à des pays différents en fonction de leurs frontières. Notre avis est tel et nous ne le changerons pas.

En ce qui concerne, monsieur Heigh, la question à débattre dont vous parlez, je sais que vous êtes un grand ami du Turkménistan, et aussi le grand ami de mon ami - Turkmenbachi. Cependant, je voudrais qu`au moment de donner les consultations à mon ami Turkmenbachi, vous lui expliquiez certains détails. Puisque nous avons signé le contrat en septembre 1994 et dès ce temps Turkmenbachi n`a pas soulevé cette question. Il y a 10-15 jours il a dit d`un coup que ces deux gisements qui appartiennent à l`Azerbaïdjan, appartiennent soit disant à Turkménistan également. Premièrement, ces revendications sont infondées, deuxièmement s`il n`accepte pas le principe sectoriel, pourquoi il avance ces revendication, se basant sur ce principe?

Quelques jours avant mon arrivée en Amérique, j`ai eu un entretien téléphonique avec Turkmenbachi et je lui ai dit que s`il avait une question litigieuse, les délégations doivent se rencontrer et discuter de cette question. Il n`y a pas besoin de gonfler cette question, puisque cela permettra à la Russie agir en Caspienne selon le principe " diviser pour régner ". Sur les cartes dont je vous ai distribuées est présenté clairement le principe sectoriel. Je vous remercie.

Question: Monsieur le Président, dans le cadre de ce sujet je veux dire qu`entre la compagnie internationale opérationnelle d`Azerbaïdjan et le gouvernement de l`Azerbaïdjan sont établies de très bonnes relations, est signé le contrat. En rapport avec ce contrat on a évoqué ici une question litigieuse territoriale. Vous invitez les compagnies russes " Lukoil " et si je ne me trompe pas " Transneft " à exploiter ce territoire contesté, et autres gisements. Je voudrais savoir en quoi consiste votre stratégie, quand vous invitez les compagnies russes à exploiter ces gisements.

Heydar Aliyev: Vous devez savoir qu`à nos contrats participent déjà les compagnies des Etats-Unis d`Amérique, de la Grande Bretagne, de la France, de l`Allemagne, du Japon, de la Belgique, de la Turquie, de l`Iran, de l`Italie, de l`Arabie Saoudite. J`ai nommé 10 Etats. Tous ces pays sont situés loin de la Caspienne. Cependant, la Russie est sur la Caspienne. C`est pourquoi la participation à ce contrat de la compagnie russe " Lukoil ", le transfert à elle d`une petite part de ce contrat sont tout à fait naturels. C`est pourquoi, premièrement, cela a une importance commerciale, deuxièmement, vous devez savoir que pour mener les travaux sur la Caspienne, il faut user du canal Volga- Don. On ne peut en isoler complètement la Russie.

Question: Monsieur le Président, nous tous sommes ceux qui croient en construction de l`Etat azerbaïdjanais fort et indépendant, - et nous comprenons bien l`importance de l`exploitation des gisements pétroliers azerbaïdjanais.

Le trait caractéristique du succès des investissements faits en Azerbaïdjan est dû encore à ce que les produits pétroliers reçus grâce à ces investissements seront livrés en sécurité aux marchés mondiaux. Nous savons quelles mesures sont prises pour résoudre les problèmes liés aux oléoducs qui sont en cours de construction en Azerbaïdjan et qu`un nombre de conflits sont liés à cela. Que pouvez vous dire sur l`exportation du pétrole azéri et sur les itinéraires des pipelines? Dans quelle direction ira l`oléoduc principal?

Heydar Aliyev: Vous savez que dès qu`en septembre 1994 nous avons signé le contrat, nous avons subi la pression de la Russie. Malheureusement, l`Arménie et l`Iran ont rejoint la Russie. Ils ont estimé que malgré notre signature du contrat, ils ne nous permettrons pas d`extraire le pétrole. La Russie considère que tout le pétrole extrait en Caspienne doit être transporté à travers son territoire. Même alors quand ces jours-ci votre ministre d`énergétique était à Moscou et avait rencontré le vice premier ministre Nemtzov, on a passé une petite émission à la télé russe: le vice premier ministre Nemtzov a dit à votre ministre d`énergétique- extrayez le pétrole de la Caspienne autant que vous voulez mais tout le pétrole doit être transporté à travers la Russie. C'est-à-dire si la Russie n`a pas pu empêcher la conclusion du contrat, elle veut s`opposer au choix des voies d`exportation de notre pétrole. Cela est connu bien par l`administration de l`Amérique, et par monsieur Bill Clinton également.

C`est pourquoi nous avons adopté la décision sur la construction de deux oléoducs pour exporter le premier pétrole. Monsieur Clinton m`en a parlé avec insistance. L`un des oléoducs passera par le territoire de la Russie débouchant au port Novorossisk de la mer Noire, l`autre - à travers le territoire de la Géorgie au port Soupsa de la mer Noire également. Ces deux pipelines sont destinés à exporter le premier pétrole. Cependant, nous attendons le grand pétrole. Dans quelle direction pourra-t-on exporter le grand pétrole et non seulement des gisements de l`Azerbaïdjan, mais aussi du Kazakhstan? Nous prévoyons la construction des pipelines suivant le tracé Géorgie- Turquie- Méditerranée - port Ceyhan. La Russie veut que tout le pétrole passe par son territoire, l`Iran - qu`il traverse le sien. Nombreux sont ceux qui estiment que de point de vue commercial le dernier est plus efficace.

Le tracé du premier oléoduc à travers la Russie causa beaucoup de difficultés à la Russie. Les Tchétchènes protestaient contre le tracé de pipeline de 100 km par leur territoire. Les dirigeants russes se sont adressés à moi. Le Président de la Tchétchénie Aslan Maskhadov m`a visité à Bakou. Ensuite, était venu le premier vice-ministre de la Russie Nemtzov. Nous avons signé un accord tripartite entre la Russie, Azerbaïdjan et Tchétchénie.

Il existe un accord entre le Kazakhstan et nous. Le pétrole extrait par la compagnie " Chevron " sur le gisement " Tenguiz " nous acheminons par la Caspienne à Bakou et de là via le territoire de la Géorgie vers la mer Noire. En juin, Nazarbayev et moi, nous avons signé l`accord sur le tracé de l`oléoduc sous-marin du Kazakhstan à Bakou. C`est pourquoi tout le pétrole extrait en Caspienne sera livré sur les marchés occidentaux exclusivement par le territoire de l`Azerbaïdjan. C`est l`itinéraire le plus acceptable pour l`Occident et pour l`Amérique également.

Question: A la fin de 1995 le Président Clinton et Antony Lake m`ont demandé de visiter votre région, de vous rencontrer et de vous informer de la position américaine sur le tracé de deux pipelines pour l`exportation du premier pétrole. En rapport avec cela, je voudrais savoir est-ce que le Conseil d`administration du monsieur Antony Lake ait quelque chose à dire à ce sujet?

Antony Lake: Je vous donnerai une brève information. Il est tout à fait clair que nos avis stratégiques sont très proches de la position dont vous venez d`énoncer. Je pense que les Russes également comprennent déjà notre position dans cette question. En tant que participant aux pourparlers tenus en 1993-1995, je déclare que ces positions ont été annoncées ouvertement aux Russes. Je suis sûr que bien que chacune des personnes assises autour de cette table comprenne parfaitement à quel point cette question soit profitable des points de vue stratégique et économique, elle n`est pas perçue à fond à Washington. C`est pourquoi je considère que votre visite à Washington va contribuer à la compréhension plus adéquate de cette question.

Question: Si vous permettez, je reviens à la question soulevée par monsieur Heigh. C`est la question du Haut Karabakh qui est liée directement au pipeline. Je voudrais savoir, est-ce qu`il y a lieu aux concessions potentielles dans la résolution du conflit au Haut Karabakh? Merci d`expliquer votre position à ce sujet.

Heydar Aliyev: Merci beaucoup. C`est une question très importante pour moi, puisque j`ai déjà dit que le premier but de ma visite ici est le renforcement de l`aide des Etats-Unis d`Amérique dans la résolution du conflit de Haut Karabakh. Sur les cartes distribuées à vous vous voyez que 20 % des terres azéries, y compris le Haut Karabakh sont occupés par les forces armées arméniennes. Il y a trois années nous avons signé l`accord sur le cessez-le feu. Trois ans il n`y a pas de feu.

Enfin, au sommet de Lisbonne en décembre de l`année passée sont définis trois principes de la résolution du problème: premièrement, la reconnaissance de l`intégrité territoriale de l`Azerbaïdjan et de l`Arménie, deuxièmement - attribution du haut statut d`autodétermination au Haut Karabakh à l`intérieur de l`Azerbaïdjan et troisièmement - l`assurance de la sécurité à l`ensemble de la population du Haut Karabakh. Bien que ces principes ne nous satisfassent pas pleinement, nous avons voté à Lisbonne leur adoption. Des 54 membres de l`OSCE 53, y compris les Etats-Unis d`Amérique ont voté pour ces principes, et l`Arménie vota contre.

Vous savez qu`actuellement les coprésidents du groupe de Minsk de l`OSCE sont l`Amérique, Russie et France. Le 20 juin à Denver, trois Présidents - Bill Clinton, Jacques Chirac, Boris Eltsine - sont intervenus avec la déclaration commune sur la résolution pacifique de ce problème. Le coprésident américain est monsieur Strobe Talbot. La dernière fois les trois coprésidents nous ont présentés les propositions composées de deux parties. A la première étape - la libération des six régions situées autour du Haut Karabakh des forces armées arméniennes et après le retour des citoyens chassés dans leur pays natal. Je veux vous donner quelques explications concernant cette carte. Le territoire du Haut Karabakh est coloré en rouge. En vert - le territoire des six régions administratives de l`Azerbaïdjan, situées autour du Haut Karabakh, en jaune la région occupée de Latchine ou vivent exclusivement les Azerbaïdjanais et qui appartient à l`Azerbaïdjan. Ici est montrée la région de Choucha qui était au sein du Haut Karabakh, mais dont la majorité absolue était les Azerbaïdjanais et qui est le centre culturel de l`Azerbaïdjan. Tous ces endroits colorés qui font 20% du territoire de l`Azerbaïdjan sont sous l`occupation des forces armées arméniennes. On a chassé de ces territoires plus d`un million de citoyens azerbaïdjanais qui vivent à présent dans d`autres endroits de l`Azerbaïdjan dans les tentes. Monsieur Brzézinski a vu leurs tentes.

Conformément à la dernière proposition du groupe de Minsk nous demandons avant tout la libération des régions colorées en vert sur la carte et le retour dans ces régions de leurs habitants. Après cela, en deuxième étape, pendant la définition du statut du Haut Karabakh nous demandons la libération de l`occupation des régions azerbaïdjanaises colorées en jaune sur la carte. Vous savez que cinq ans un million de réfugiés vivent dans les tentes, un million de la population composée de sept millions de la république sont les réfugiés. Je veux vous informer que la Russie a déployé ici ses troupes et a promis mainte fois de résoudre cette question. Cependant, nous n`avons pas donné notre accord à la venue des troupes russes en Azerbaïdjan. Nous n`avons ni troupes russe, ni bases militaires russes.

En Arménie existent des corps de troupes importants, une base militaire russe, entre la Russie et l`Arménie il existe une union militaire. Les frontières de l`Arménie avec la Turquie et l`Iran sont gardées par les troupes russes également. Dans la même situation est la Géorgie. Nous sommes un Etat unique au Caucase dans le territoire duquel il n`y a pas un seul soldat russe.

Pendant que nous sommes dans une situation aussi difficile, la Russie nous a proposé plusieurs fois de donner notre accord sur le déploiement de ses troupes en Azerbaïdjan, qui libéreraient les terres occupées. Mais nous n`y avons pas donné notre accord. C`est pourquoi pour faire sortir de là les troupes militaires arméniens il faut organiser les forces de paix multinationales de l`OSCE et les envoyer dans la région.

Question: Monsieur le Président, je voudrais vous poser une question idéologique liée à votre vie personnelle. Vous avez eu une carrière politique excellente, vous êtes monté jusqu`à devenir membre du Bureau politique, et actuellement vous êtes chef de votre Etat. Comment se sont produits de tels changements idéologiques en vous?

Heydar Aliyev: Peut être cela vous surprend mais c`est naturel. Ma vie et mon activité à cette période - c`est une des étapes de ma vie. Dès la fin des années 1980, en particulier en 1987 quand j`ai démissionné du Bureau politique, la deuxième partie de ma vie commença. Je vais vous offrir un petit livre où vous apprendrez à quel point le communiste Heydar Aliyev fut anticommuniste. Mais je dirai en peu de mots. Suite aux collisions liées au nombre de problèmes j`ai démissionné du Bureau politique. En 1988 l`Arménie a commis l`agression contre l`Azerbaïdjan, le conflit commença. Je protestai contre cela. Néanmoins, les dirigeants du Parti communiste - Gorbatchev et autres n`ont rien fait pour prévenir le conflit.

En 1990 par l`arrêté du Parti communiste les corps de troupe de l`armée soviétique furent introduits à Bakou et commencèrent à exterminer le peuple azerbaïdjanais, s`efforçant à étouffer le mouvement de libération nationale. A l`époque, je vivais à Moscou où j`intervenais aux meetings et réunions et je déclarai ma protestation contre l`arrêté de l`Union Soviétique et ensuite je quittai les rangs du parti communiste. C`est pourquoi on commença à faire pression sur moi. Je menai la lutte dirigée à faire effondrer l`Union Soviétique. A Moscou on voulait m`arrêter. Je suis venu en Azerbaïdjan. A l`époque c`était encore le régime communiste on ne m`a pas donné la possibilité de vivre à Bakou et je suis parti là où je suis né - à Nakhitchevan qui était en blocus. J`y ai vécu trois ans, je vivais dans des conditions difficiles, j`ai été poursuivi. Là bas, j`ai fait mes premières démarches pour que l`Azerbaïdjan suit la voie de la démocratie. Puisque je suis un homme respectable en Azerbaïdjan, le peuple a cru à mes déclarations sur la chute du Parti communiste et de l`Union Soviétique. Dès ce temps je veux voir l`Azerbaïdjan en tant qu`Etat démocratique indépendant.

En 1993, quand en Azerbaïdjan commença la guerre civile, le peuple demanda mon retour et je suis venu à Bakou. Dès ce temps je m`occupe de la construction de l`Etat démocratique, de droit en Azerbaïdjan. Cela est prouvé par tout ce que j`ai fait pendant ce temps.

Il est très difficile au Caucase de défendre et préserver l`indépendance nationale de l`Azerbaïdjan dans toute son intégralité. 20% de notre territoire est sous l`occupation des forces armées arméniennes, plus d`un million de nos citoyens sont réfugiés et vivent dans les tentes. Nous sommes très amis avec nos voisins - la Géorgie et la Turquie. Mais nous avons des adversaires très forts, des ennemis. Et dans cette situation je préserve l`indépendance et je construis la démocratie également. Dans notre pays le pluralisme politique existe, chacun peut exprimer son avis.

Nous avons la liberté de pensée, plus de 30 partis fonctionnent, 8 partis sont représentés au parlement.

Question: Monsieur le Président, examinons avec votre permission le futur. Je considère qu`après l`adoption de la décision sur l`élargissement de l`OTAN vers l`Est, les projets stratégiques russes feront face au problème de quelle manière établir la politique avec les Etats actuels indépendants, qui appartenaient à l`ancienne Union Soviétique. J`ai en vue la question de la dépendance économique de ces pays et de l`indépendance politique. Monsieur le Président, j`avance une telle supposition, si vous étiez conseiller pour les questions de la sécurité nationale du futur Président des Etats-Unis d`Amérique, quelle position auriez vous occupé à l`égard de la Russie, en définissant la politique du Président vis-à-vis des pays entrant à l`ancienne Union Soviétique, comment auriez vous parlé à la Russie.

Heydar Aliyev: J`aurais donné beaucoup de bonnes consultations, je demande à me nommer à ce poste. (Rires) J`aiderais, puisque je connais très bien la Russie. Et la situation de l`Azerbaïdjan est particulièrement difficile. La Russie considère l`Arménie comme son plus grand support au Caucase. Combien de soldats sont déployés sur une petite superficie, sur le territoire de 29 mille km2? Les derniers temps on a appris que les derniers trois ans le Ministère de la défense russe livra illégalement à l`Arménie l`armement le plus puissant qui coûte 1 milliard de dollars. Nous avons posé cette question au Président Boris Eltsine. Nous avons des listes avec les fusées et les chars livrés à l`Arménie. Même les fusées aux ogives nucléaires. Elles peuvent détruire non seulement l`Azerbaïdjan mais tout autour. Vous avez la carte. Sur cette carte sont marqués par les cercles les points de la destruction éventuelle par les fusées livrées à l`Arménie par la Russie. C`est pourquoi si j`étais le conseiller du Président pour la sécurité nationale, je conseillerais au Président de l`Amérique d`avoir une attitude plus sérieuse envers de telles questions. Nous sommes membre de la CEI cependant nous avons une position indépendante et suite à notre position indépendante nous n`y sommes pas un pays trop aimé.

Question: Quelle était la position de monsieur Eltsine quand vous lui avez posé cette question? Puisque la Russie est coprésident dans la résolution du conflit du Karabakh, quelle est votre attitude à cette action?

Heydar Aliyev: C`est ça le paradoxe ! Qu`est-ce que je peux faire à présent?

Nous sommes un pays pas très grand, 20% de notre territoire sont occupés. Quand en mars j`ai été à Moscou et je suis intervenu à la réunion des chefs d`Etat des pays de la CEI, j`ai demandé pourquoi la Russie entretient sa base militaire en Arménie? Qui en est intéressé, contre qui est-elle orientée? Est-ce possible que entre deux Etats entrant dans une union, dans la CEI il y ait encore une union militaire à part? En mars j`ai dit à Eltsine que les armes livrées à l`Arménie doivent être rendues et ceux qui les ont livrées doivent être punis. Il donna l`ordre aux organes d`instruction, on mène une enquête. Mais nous sommes au courant de tout, puisque nous avons tous les documents et une partie de ces documents est publiée dans les journaux. Quand en juin j`ai rencontré Eltsine il me donna de nouveau sa parole qu`il va entreprendre toutes les mesures nécessaires. J`attends, pour le moment Eltsine se repose, après son retour nous verrons.

Vous me posez la question, moi également je veux poser une question. Dans une situation pareille, en 1992 le congrès d`Amérique adopta une décision injuste à l`égard de l`Azerbaïdjan concernant l`article 907. Pendant les pourparlers avec moi le Président Clinton a dit qu`il était contre cet article. Le secrétaire d`Etat madame Albright est intervenue et demanda l`annulation de cet article. Par le passé monsieur Bush fut également contre cela. Il y a quelques jours le congressiste King présenta au congrès un bon projet de la décision dans laquelle il demande l`annulation de cet article.

Ici aussi il y a un paradoxe. L`Arménie occupa notre territoire, chassa nos gens de leur pays natal. Et on nous accuse d`avoir soit disant bloqué l`Arménie et de l`avoir privée de l`aide américaine. L`Amérique aide annuellement l`Arménie au montant de 100, 250-300 millions de dollars et nous n`avons pas d`aide. Les sociétés américaines procédèrent à un travail à long terme en Azerbaïdjan - pour 30, 40, 50 ans et l`Amérique en aura de gros bénéfices. Et dans cette situation l`Amérique discrimine l`Azerbaïdjan. Aujourd`hui au Congrès je parlerai de ces problèmes. J`ai évoqué ces sujets plusieurs fois avec monsieur Brzézinski. Je vous appelle à lever cette injustice.

Le trait particulier de l`Etat américain, de la société américaine est la justice. Cependant, cet acte injuste du Congrès des USA ne correspond pas à l`image de l`Amérique. Quand nous soulevons ces questions, on nous dit que tout cela a eu lieu sous l`influence de la diaspora, du lobby arméniens. Parfois je me pose la question, est-ce que le lobby arménien soit plus fort que les milieux gouvernementaux américains? Je ne veux pas y croire. On me dit qu`en Amérique vit un million d`Arméniens.

La population américaine fait - 300 millions. Si un million d`Arméniens vous dirige, alors dans quelque temps un Etat arménien sera créé en Amérique. Prévenez ce danger.

Vous vous rappelez je vous en ai parlé à Bakou - nous aspirons vraiment à l`accord, à la paix. L`Azerbaïdjan et l`Arménie coexistaient côte à côte durant des siècles et par la suite également vivront côte à côte des milliers d`années. C`est pourquoi il n`a pas lieu à cette haine, contradiction, hostilité. Nous voulons vraiment que la paix soit établie avec l`Arménie, que soient rétablies de bonnes relations que nous avons eu dans le passé et que nous vivions dans les conditions de paix. En parlant du statut d`autodétermination du Haut Karabakh à l`intérieur de l`Azerbaïdjan je veux vous assurer qu`on y créera des conditions parfaites. Je sais que notre voie est uniquement la voie de paix et nous soutenons cette position.

Merci, je suis tout à fait satisfait de la rencontre avec vous. J`invite chacun de vous en Azerbaïdjan. Je voudrais que vous veniez en Azerbaïdjan. Monsieur Brzézinski a visité l`Azerbaïdjan, il peut vous en parler. Monsieur Scowcroft y fut également. Mais j`invite de nouveau chacun de vous en Azerbaïdjan. Je voudrais beaucoup que de bonnes relations amicales s`établissent entre vous et l`Azerbaïdjan, entre vous et moi personnellement. Je vous remercie, merci beaucoup.

Traduit du journal "Bakinski rabotchi" du 14 août 1997