Entretien du Président de la République d`Azerbaïdjan Heydar Aliyev avec l`ambassadeur de France – 6 juillet 1999


Heydar Aliyev: C`est un grand plaisir de vous revoir. J`ai entendu dire que vous vouliez me parler, que vous vouliez discuter de quelques questions.

Jean Pierre Guinhut: Monsieur le Président, je vous témoigne ma gratitude pour votre accueil aujoud`hui. Votre temps est très précieux. C`est pourquoi j`essaierai d`être bref.

J`étais impatient de vous revoir. Depuis votre retout des Etats- Unis c`est la première fois que j`ai la possibilité de vous voir. Je tiens à vous transmettre les félicitations du Monsieur Jacques Chirac qui se réjouit que vous vous sentiez bien maintenant.

Monsieur le Président je voudrais vous dire que pendant votre maladie Monsieur Chirac m`a demandé à plusieurs reprises des nouvelles de votre santé, il s`interrogeait sur le déroulement de votre traitement.. Il est heureux que vous vous sentiez bien et je lui a confirmé ce dernier point.

Le Président Jacques Chirac m`a demandé de vous transmettre sa lettre diplomatique. La lettre est un peu longue. Monsieur le Président, l`analyse du déroulement des événements concernant le Kosovo et son opinion argumentée à ce propos fournissent le contenu dans cette lettre. Le Président Chirac souhaite que vous connaissiez sa position. En expliquant en détails sa position, il tient à faire connaître le sens de la participation de la France aux opérations du Kosovo.

Le Président Chirac souligne trois éléments essentiels: le premier est humanitaire, c`est à dire lié aux personnes. Le deuxième est un élément lié à l`espace européen. Le Président Chirac voudrait bien que cette question de la guerre ne se pose plus, que l`Europe soit unie intégralement et ne fasse qu`un. Bien sûr le Président Chirac évoque aussi la participation des Etats-Unis à cette guerre et ses efforts pour que cette guerre s`achève. Enfin, Monsieur Chirac souligne que lui- même avait oeuvré pour unir les efforts des Européens et des Américains et pour placer le déroulement des événements sous le contrôle de l`ONU.

Heydar Aliyev: Une lettre importante. Il me semble que de nombreuses questions y sont abordées.

Monsieur l`ambassadeur, je remercie Monsieur Jacques Chirac pour sa bienveillante attention envers moi pendant ma maladie et mon traitement. Recevoir une lettre du Président Chirac quand j`étais à l`hôpital à Cleveland a été très important pour moi. Il est naturel que la chaleur manifestée par ses amis, par ses proches est plus importante pour un malade que les soins d`un médecin ou des médicaments. La lettre que j`avais reçue illustre la bienveillance et les relations d`amitiés qui existent avec le Président Chirac. Les informations que vous venez de me délivrer me réjouissent et m`indiquent que le Président Chirac s`intéresse toujours à ma santé. Selon les informations que vous lui avez fournies il est au courant que ma santé est bonne et il en est rassuré.

Je suis heureux que des relations d`amitié se soient tissées entre moi et le Président Chirac. Je l`apprécie hautement et je trouve que cet aspect est très important pour le développement des relations franco–azerbaïdjanaises.

Avec le Président Jacques Chirac à Washington, nous nous sommes rencontrés au 50e anniversaire de l`OTAN et nous avons mené ensemble une négociation très importante. La grande partie de notre négociation a été consacrée au règlement pacifique du conflit arméno–azerbaïdjanais. Le Président français m`a fourni des informations sur les travaux déjà accomplis et ceux qui restent encore à effectuer en sa qualité de coprésident du "Groupe de Minsk". Lors de cette rencontre, au cours de ces négociations, j`ai eu la conviction que le Président Chirac souhaitait un règlement rapide du conflit arméno-azerbaïdjanais en suivant le chemin de la paix et qu`il utilisait toutes ses ressources en ce sens.

Mais ni le Président Chirac, ni moi-même nous ne pouvions nous figurer que deux ou trois jours après cette rencontre je me retrouverais à l`hopital aux Etats- Unis. Mais peut–être le fallait-il car j`y ai été bien soigné et maintenant, nous reprenons notre travail avec une nouvelle énergie et de nouvelles forces. Je vous prie encore une fois de lui transmettre ma gratitude et mes remerciements et de l`informer que j`apprécie hautement ces relations d`amitié et que je serai toujours fidèle à cette amitié.

C`est un plaisir pour moi que le Président Chirac m`ait envoyé maintenant une lettre sur le problème du Kosovo, qui est une des questions les plus importante pour la communauté internationale, et qu`il me fasse partager ses opinions et ses hypothèses. Je vais lire attentivement cette lettre et je lui répondrai. Mais vous m`avez déjà informé des points principaux de cette lettre. Je peux dire que je partage absolument les opinions du Président Jacques Chirac.

Je sais que l`Etat français et le Président Chirac ont fait beaucoup pour  trouver un règlement pacifique, sur  la base des principes internationaux, à la question du Kosovo. Nous avons suivi la rencontre de Rambouillet, qui a duré longtemps, et chaque fois nous pouvons témoigner que les pays membres de l`OTAN, ainsi que la France, ont essayé de trouver un règlement correct et équitable à cette question. Malheureusement, toutes ces entreprises sont restées sans résultats. Parce que la Yougoslavie et son Président Milosevic ont choisi un chemin erroné. C`est pourquoi les mesures de  l`OTAN étaient rendues nécessaires pour résoudre cette question. Nous les avons approuvés et les approuvons aujourd`hui. Si difficiles et dures soient–elles, que tant de moyens aient été dépensés, je crois ces décisions ont été une tâche essentielle pour protéger les droits de l`éthnie albanaise en Europe et prévenir la violence.

Enfin, les mesures de l`OTAN se sont achevées avec succès. Maintenant, la normalisation de la situation au Kosovo est une des conditions importantes de la sauvegarde de la paix et de la sécurité en Europe. Comme la France et Monsieur Chirac, nous apprécions aussi les efforts que les Etats-Unis ont déployés et les mesures prises pour un tel règlement de cette question, nous trouvons que tout cela a été correct pour rétablir les règles et la loi dans la communauté internationale.

Encore une fois je déclare avoir partagé les idées exposées dans cette lettre et j`enverrai bientôt ma réponse à cette lettre.

Jean Pierre Guinhut: Monsieur le Président, si vous me le permettez je voudrais aborder les questions de coopération. La question que je voudrais porter à votre attention est que le président du Sénat français, Monsieur Christian Poncelet, effectuera une visite le 22 juillet au Caucase et en Azerbaïdjan. Monsieur Poncelet est le deuxième personnage de l`Etat après le Président et il est son ami. Il a été élu président du Sénat français l`année passée.

D`habitude il voyage beaucoup. Cela fait partie de ses fonctions. La visite dont je vous parle a pour but de rencontrer et d`avoir des échanges de vue avec les présidents des Parlements de trois Etats du Caucase du Sud avant sa rencontre envisagée au mois de septembre de cette année. Le motif-clé de cette initiative est de mener des négociations avec les chefs des pays du Caucase du Sud, ainsi que de tisser plus de relations entre eux et de chercher les moyens possibles pour résoudre dans les meilleurs délais le conflit entre les deux pays du Caucase du Sud. Avant cette rencontre il y a eu une rencontre des présidents des Parlements de trois pays du Caucase du Sud tenue sous l`égide du Conseil de l`Europe. Selon Monsieur Poncelet, il faut poursuivre cette expérience. C`est à dire il pense que pour se rapprocher de la paix on ne doit négliger aucun moyen, on doit utiliser tous les moyens. Le rétablissement de la paix dans le Caucase est une mission importante pour le Sénat français.

D`une part, c`est une visite agréable, d`autre part, c`est une visite symbolique, c`est à dire cette visite a pour objectif de connaître aussi le Parlement azerbaïdjanais. Monsieur le Président, je tiens à dire que pendant que Monsieur Poncelet séjournera en Azerbaïdjan, bien sûr il souhaiterait aussi vous voir et s`entretenir avec vous. Il en serait très content.

Heydar Aliyev: Je me réjouis de cette information. Nous apprécions beaucoup les rencontres avec les fonctionnaires du gouvernement et de l`Etat de la France pour développer nos relations avec ce pays.

Bien sûr que la visite de Monsieur Poncelet dans les pays du Caucase du Sud, ainsi qu`en Azerbaïdjan, peut contribuer aux efforts de la France pour rétablir la paix et la sécurité dans le Cauacase du Sud. Vous pouvez être sûr que Monsieur Poncelet témoignera d`une réception amicale, affectueuse et très hospitalière. Il va sans dire que nous le rencontrerons et que nous pourrons nous entretenir, et ainsi, nous accomplirons une nouvelle démarche en faveur de l`avancement des relations azerbaïdjano–françaises. Je vous prie de transmettre ces quelques mots à Monsieur Poncelet.

Jean Pierre Guinhut: Monsieur le Président, je vais aussitôt lui transmettre cette nouvelle et ce sera un grand plaisir pour lui. Car il souhaite beaucoup  pouvoir visiter Bakou.

Heydar Aliyev: Nous nous réjouissons de son arrivée.

Journal "Azerbaïdjan" le 7 juin 1999